jean fontaine est un sculpteur céramiste reconnu dans l’univers de la céramique contemporaine.
l’univers du sculpteur est peuplé de créatures hybrides, enchevêtrements parfaits de corps, d’animaux et de lourdes pièces mécaniques, ses chimères de céramique mêlent avec humour, sueur et cambouis, vie et machinerie. ces créatures surprenantes nous dévoilent un univers fantasmagorique, véritable mythologie du futur.
l’artiste nous livre une version onirique d’un monde où les frontières entre l’homme et sa création se confondent au point d’en rejeter la définition vers des limites extraordinaires.
ce chirurgien-céramiste part souvent de moulages de pièces mécaniques (boulons, vilebrequins, pieds de bielle…) sur lesquels il rajoute ses propres créations dérivées du corps humain. cette quincaillerie prend corps en de surprenants êtres humains, à moins que ce ne soit la machine qui respire. l’humaine quincaillerie qui s’affirme sous les yeux du visiteur se situe dans la lignée de l’univers d’un capitaine némo débarqué des rêves de jules verne
musée de la faîence de sarreguemines
le sculpteur jean fontaine met le doigt sur l’engrenage pervers qui met en branle raison et folie. le corps humain, c’est un squelette, des os, des muscles, des nerfs, un cerveau et ça fonctionne selon une logique proche de la mécanique.
il faut parfois déboucher les artères, recoudre, piquer, perfusionner, plâtrer.
jean fontaine, lui, pratique la greffe. il prélève ici pour replacer là. en chirurgien-céramiste, il transplante des rouages – clapets, cliquets, condensateurs, culbuteurs, cylindres – pour les aboucher, emboîter, emmancher, empapaouter, gamahucher, accoupler avec des parties humaines.
de ces coîts naissent des œuvres, accouchées dans le cambouis et arborant d’emblée la belle noirceur du métal gazoilé.
dans ces hybrides – mécanobizarreries, dingomachines, locotechniques – tout est pourtant éminemment logique, rationnel.
ça pourrait marcher. ça nous fait, en tout cas, marcher. grâce à ses tours de passe-passe, le céramiste fontaine fait sourdre le trompe-l’œil.
il joue avec les formes, comme d’autres jouent avec les mots. il ne se prive pas de triturer les titres de ses pièces pour faire pièce à la piètre logique. car, chez Fontaine, on parvient au constat que trop de raison fortifie l’absurde.
des machines trop parfaites prouvent la débilité de l’homo sapiens. l’humain n’étant forcément qu’imparfait, impulsif, tête en l’air, fragile. de même que des états totalement homogènes ne peuvent aussi que rejeter l’individu, ce petit rouage égocentrique, indocile, indolent. face à cette totalitechnique, même dieu n’est plus qu’un vieillard barbu, tout juste bon à surveiller la mécanique céleste et à actionner sa burette pour lubrifier les rouages terrestres.
voilà comment les avant-propos perdent la post-face, puisqu’on ne dispose toujours pas d’une machine à écrire les préfaces ou, mieux, les pré-farces.
michel froidevaux